Sam Beaugey
Sam Beaugey
Réalisateur
Un père guide de haute montagne, une mère monitrice de ski et ancienne gardienne de refuge, un grand frère moniteur de parapente, Sam a grandi au pied du mont Blanc. En 1994, il entre à la Compagnie des guides de Chamonix. Pitons, crampons, piolets, wingsuit, parapente, snowkite, ski, snowboard, parapente... ce qu'il y a de plus dur pour lui, c'est de trouver un sac suffisamment grand pour y glisser tous ses jouets ! Sam est un alpiniste touche-à-tout option « baston » : première descente à skis du Linceul aux Grandes Jorasses (1995) avec Jérôme Ruby en snowboard, ouverture en Himalaya d'Extra bleu ciel au Kwangde Shar (1995), 700 sauts en base-jump à son actif depuis 1994, tentative de descente en snowboard de la face Nord de l'Everest (1998), ouverture de la voie Azazel avec l'équipe de Planète Big Wall et premier saut en wingsuit du Pulpit de Trango (2005)... Québec Givré (co-réalisé avec Erwan Le Lann) et Baffin, l'île aux enfants donnent à la montagne un sacré coup de jeune, aux antipodes des scenari shakespeariens qui lui collent bien souvent à la paroi.
En 1996, tu as démarré une aventure de film en 16 mm avec Jerôme Ruby et André-Pierre Rhem en Norvège, comment et pourquoi le fait de réaliser des films est devenu important à tes yeux ?
A cette époque, le base-jump était peu connu du public. Notre idée avec Free Base était de montrer le plaisir que nous éprouvions d'être en montagne, à la montée comme à la descente. Jérôme Ruby était l'inspirateur du groupe et c'est grâce à lui que j'ai eu envie à mon tour de raconter les histoires de nos aventures sous l'angle du partage et du plaisir.
Est-ce plus difficile de traduire, en réalisant un film, le partage, le plaisir dans l'engagement, l'esprit de la cordée... plutôt que la performance et la souffrance ?
Tout prend une autre tournure à partir du moment où tu décides de filmer, tu n'es plus seulement là pour faire mais également pour montrer. Le plus grand danger est de perdre son naturel. Les images traduisent souvent le climat profond qui règne au sein de l'équipe... sauf qu'en pleine baston, au sens propre comme au figuré, on n'est pas beaucoup tenté de filmer.
Quel est le film que tu rêverais de réaliser ?
Une fiction en 35 mm sur l'histoire de deux hommes et deux femmes qui ont tout perdu et se retrouvent au bout du monde pour grimper. Propos recueillis par A.D.
Photo © David Ravanel
Sam Beaugey en Antarctique : expédition en "Train kite" !
Cet hiver, Sam Beaugey et son ami François, sont partis sur le "continent blanc" pour ouvrir de nouveaux sommets en mixte et en rocher. Ils ont fait une traversée de 12 jours en autonomie dans le massif de l'Holtanna en "train-kite". Une astucieuse combinaison de skis et pulkas tractés par un kite !
Sam et François nous font partager le récit de cette nouvelle aventure...
Erwan Le Lann
Guide de haute montagne et responsable événement et sponsoring chez Petzl, Erwan, 37 ans, a participé à de nombreux films devant et derrière la caméra. Après quelques années de pratique de la montagne à haut niveau, il s'est vite aperçu que tous les clichés qu'il entendait au sujet de la montagne ne collaient pas du tout à ce qu'il vivait avec ses compagnons de cordée. Il s'est donc décidé à acheter une caméra pour montrer à son entourage l'ambiance joyeuse, le plaisir, la sincérité et l'intensité de ses histoires de cordée. Après ses films de « vacances d'alpiniste », il se lance dans son premier « vrai film » en 2001 avec Douceur d'été en Patagonie, un film qui raconte son ascension hivernale du Super-Couloir du Fitz Roy (une voie mixte pour alpinistes vikings), avec Jérôme Blanc-Gras et Max Berger sur les pas de Lionel Terray et Guido Magnone... Erwan est quelqu'un de posé et réfléchi, c'est donc quatre ans plus tard, qu'il fait le pas en 2005 pour un « vrai, vrai film de réalisateur » : Québec Givré.
Québec Givré, c'est l'aboutissement de quatre ans de réflexion ?
La difficulté n'étant plus forcément d'emporter le matériel pour filmer en montagne, je ne pars jamais en expé sans ma caméra et reviens chaque fois avec des heures et des heures de bandes brutes, non montées... Filmer c'est bien, mais monter, diffuser, simplement réaliser un film c'est plus dur... Je parle surtout de ce que ça coûte en argent, en temps et en investissement personnel. L'écriture, c'est différent. Je pense qu'en sport c'est bien d'avoir une guideline d'un projet, mais le plus important est de réunir les bonnes personnes pour que l'histoire s'écrive, voire faire en sorte de compliquer volontairement l'organisation pour arriver à des situations drôles, originales, intéressantes... C'est petit à petit que nous sommes arrivés à monter le projet de Québec Givré avec Sam Beaugey. Nous voulions arriver à connecter nos différentes activités sur un même projet, d'où la quête de cette cascade de glace que nous avons baptisée "L'appartement", suffisamment raide pour sauter du haut en base-jump.
Quelles sont tes sources d'inspiration en termes d'image et d'écriture ?
Je ne crois pas être un rêveur, mais j'ai des envies que j'aime bien réaliser. Aujourd'hui, j'ai envie d'allier bateau à voile, grimpe et base-jump. Alors je cherche un lieu puis une équipe, je regarde le côté original de l'ensemble pour me donner une idée de l'histoire et surtout je fais confiance à ce qui va se passer pendant le tournage. Propos recueillis par A.D.